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# ‘VINCENT TOUT-PUISSANT’.

L’ENQUETE QUE BOLLORE A VOULU EMPECHER …

Auteurs : Nicolas Vescovacci, Jean-Pierre Canet

Editeur : JC Lattès (2018)

Quand un huissier s’est présenté à sa porte, Nicolas Vescovacci a d’abord cru à une erreur. Puis il a compris : Vincent Bolloré lui réclamait 700 000 euros pour avoir simplement cherché à obtenir une interview avec l’homme d’affaires ou ses proches. Cette « anecdote » dit tout : l’art de l’intimidation du tycoon, son goût de la transgression, sa puissance de feu financière, la démesure de son monde mais aussi sa hantise d’être l’objet d’une enquête.

Il était, dès lors, impossible de renoncer. Ce livre est le fruit de deux années d’enquête sur les réseaux et les méthodes d’un des hommes les plus puissants de France.

LES AUTEURS :

Nicolas Vescovacci et Jean-Pierre Canet sont journalistes d’investigation (enquête sur le Crédit Mutuel, Cash Investigation, Envoyé spécial. Ils sont membres fondateurs du ‘collectif Informer n’est pas un délit’.

# REVUE DE PRESSE :

LA CRITIQUE DE TELERAMA (PARIS)

AVEC DES « BONNES PAGES » DU LIVRE :

Renvois d’ascenseur, censure, intimidation, invitations royales… Le livre-enquête signé des journalistes d’investigation Jean-Pierre Canet et Nicolas Vescovacci révèle certaines tactiques et pratiques de “Vincent tout-puissant”… Extraits, en exclusivité pour “Télérama”.

En 2015, Jean-Pierre Canet et Nicolas Vescovacci travaillaient pour Canal+. Leur documentaire sur le Crédit mutuel-CIC avait été déprogrammé par Vincent Bolloré, à la demande du pdg de la banque – et il avait finalement été diffusé sur France 3. Les deux journalistes d’investigation racontent leur mésaventure dans Vincent tout-puissant, un livre-enquête sur l’homme d’affaires breton, dont nous vous proposons de lire quelques extraits choisis ci-dessous (les titres des paragraphes ont été écrits pas nos soins).

* Les vraies raisons de la censure :

« Pendant l’été 2015, Vincent Bolloré a besoin des 3 % de Canal+ détenus par le Crédit Mutuel-CIC qui lui-même gère pour partie l’opération de rachat des actions de la chaîne (par Vivendi…)… Autrement dit, Vincent Bolloré a comme qui dirait “besoin” de Michel Lucas, le patron incontesté de la banque mutualiste pour réussir son opération […] A ce jour, cette opération de rachat des actions de la Société d’édition de Canal+ (SECP) nous semble l’explication la plus plausible à la censure de notre film. Il s’agirait donc d’un simple “renvoi d’ascenseur à son ami Michel Lucas”, comme il l’aurait expliqué à Rodolphe Belmer, l’ex-numéro 2 de Canal+. »

* Diffusion du documentaire sur le Crédit Mutuel-CIC sur France 3 en octobre 2015 : l’étrange échange entre le patron de la banque et Delphine Ernotte, pdg de France Télévisions

« La censure, […] cela peut être aussi simple qu’un coup de fil. […] Quelques jours avant l’émission, Delphine Ernotte décroche son téléphone pour prévenir Michel Lucas, le grand patron du Crédit Mutuel-CIC. La patronne de France Télévisions se souvient de la voix “d’un vieux monsieur embarrassé” qui “osa se mettre personnellement en danger” pour faire retirer notre film de l’antenne en menaçant d’arrêter les contrats publicitaires de sa banque avec les chaînes du groupe France Télévisions. Delphine Ernotte ne cède pas à ces ultimes pressions. »

* Des Guignols à la sauce Bolloré :

« Les “nouveaux” Guignols en préparation auraient reçu quelque temps après une “commande” de l’actionnaire en personne. Vincent Bolloré aurait demandé à ce qu’un sketch, mettant en scène son arrivée tonitruante à Canal+, soit filmé. Le sketch, nous confirme une source, “a effectivement été tourné”. Voici quelques bribes du scénario proposé par… Vincent Bolloré lui-même. Le patron breton aurait été présenté en Clint Eastwood, un cow-boy revêche et rapide comme l’éclair. A Canal+ toute la direction est en train de faire la fête, champagne et cotillons à gogo, “Vincent Clint Eastwood Bolloré”, en redresseur de torts, débarque alors sans prévenir, défouraille dans tous les coins et remet toute la maison au pas. Lee Van Cleef plutôt que Clint Eastwood, la Brute plutôt que le Bon. […] Ce sketch narcissique scénarisant la brutale reprise en main de Canal+ n’a évidemment jamais été diffusé sur les antennes du groupe. »

* Le CSA aux abonnés absents :

« A la fin de la réunion [avec le collectif Informer n’est pas un délit et Reporters sans frontières, ndlr], l’une des rares sages de l’institution à avoir une expérience de journaliste de terrain lâche à la délégation : “Tirez le signal d’alarme ailleurs, ici, malheureusement, il ne se passera rien.” Et, de fait, le CSA ne lèvera pas le petit doigt contre les censures ordonnées par Vincent Bolloré. »

* La “philosophie” de Serge Nedjar, le nouveau boss d’i-Télé :

« Règle numéro un : ne jamais déplaire à Vincent Bolloré.

Règle numéro deux : ne jamais nuire aux clients et partenaires de Vincent Bolloré.

Règle numéro trois : assurer si possible la promotion des produits et services “maison” ainsi que ceux desdits clients et partenaires.

Surnommé le général Tapioca par ses équipes, Serge Nedjar aurait appliqué avec zèle les consignes de son maître.  »

* Les salariés d’i-Télé défendus par… le fils du président de la République :

« Pendant quatre-vingt-dix minutes, Thomas Hollande [avocat, il est spécialisé dans le droit du travail, ndlr] remonte le moral d’une rédaction à la dérive. “La direction aurait dû mettre en place un plan de sauvegarde de l’emploi, explique-t-il à des journalistes médusés. Sinon, les 52 ruptures sont nulles et vous pourrez demander leur réintégration.” […] A la manière d’un leader syndical, il suggère à ses interlocuteurs un moyen de pression : “Dans une négociation, l’arme des salariés, cela ne peut être que la grève. Vous pouvez voter la grève tout de suite. […] Peu d’entreprises ont un tel pouvoir de nuisance, vous ne vous rendez pas compte !” »

* Coup de fil au député qui porte la loi sur… l’indépendance des médias :

Un samedi matin, Patrick Bloche entend sonner son téléphone. “Bonjour, c’est Vincent Bolloré.” Le patron de Vivendi se recommande de Bernard Poignant, le conseiller de François Hollande [ex-maire de Quimper, c’est un ami de trente-cinq ans du milliardaire breton, ndlr]. “Ce qui m’a frappé, c’est le mépris que j’ai senti dans ses propos, nous confie Patrick Bloche. Il a été tellement obséquieux, répétant cent mille fois qu’évidemment il ne voulait en rien m’influencer et qu’il était éminemment respectueux de la représentation nationale et du suffrage universel que j’ai eu le sentiment d’un mépris social. Il ne m’a rien demandé sinon pour me dire sa disponibilité dans la discussion. Il a pensé m’impressionner. […] C’était une manière de me dire : fais gaffe ! »

* Loi Florange : quand Bolloré soutient Montebourg :

« “Vous savez que je suis un défenseur de cette loi, c’est formidable !” aurait alors tonné le patron breton [lors d’un déjeuner à l’Elysée avec Jean-Pierre Jouyet, alors secrétaire général de la présidence, ndlr]. Cette loi recèle effectivement une disposition qui a tout pour plaire à Vincent Bolloré […]. Elle octroie un double droit de vote pour chaque action détenue depuis plus de deux ans par un investisseur. »

* Echange surréaliste avec un responsable de Spécial investigation :

« Costume clair, teint hâlé, détendu, Vincent Bolloré remonte une travée et se fige devant un tableau noir, sur lequel figure la liste des enquêtes diffusées et celles qui le seront bientôt. “Bolloré a bloqué son regard sur deux films, se souvient Jean-Baptiste Rivoire [alors rédacteur en chef adjoint de Special iinvestigation, ndlr]. Le premier portait sur la famille Mulliez, propriétaire d’Auchan, et l’autre sur Dominique Strauss-Kahn, DSK. Il a bredouillé les deux noms […] en faisant une moue, et là je ne sais pas ce qui m’a pris, j’ai dit : “Vous voulez qu’on ajoute Vincent Bolloré ?” Surpris par tant d’insolence, l’industriel éclate de rire et répond : “Allez-y, je n’ai rien à cacher !” »

* Les relations Bolloré-Sarkozy :

S’ils ont pu « se renifler » dès le milieu des années 80, s’apprécier au début des années 90, « l’épisode Bouygues » [la fameuse tentative d’OPA de Bolloré sur Bouygues fin 1997-début 1998, ndlr], malgré sa violence, semble paradoxalement avoir rapproché Nicolas Sarkozy et Vincent Bolloré [Nicolas Sarkozy est alors l’avocat de Martin Bouygues, dont il est très proche, ndlr].

* L’escapade de Nicolas Sarkozy sur le yacht du milliardaire :

« Départ le lendemain [de son élection, le 6 mai 2007, ndlr] pour l’île de Malte dans le jet privé de Vincent Bolloré : un séjour aller-retour tous frais payés. L’avion, le bateau, le personnel, la pension complète, tout est offert par la « maison Bolloré. » Bienvenue sur le Paloma, 60 mètres de long, 2 ponts, 7 cabines pour une capacité de 12 passagers, plus les hommes d’équipage. Tarif de location à la semaine : 190 000 euros. Le jet privé, un Falcon 900, est habituellement facturé 6 000 euros de l’heure. Sept mois plus tard, à Noël, rebelote, encore un petit tour “gratis” dans le Falcon 900 de Vincent Bolloré pour aller en Egypte. »

* Les relations de Bolloré avec l’abbé Grimaud :

« Nous avons rencontré un prêtre qui observe l’homme d’affaires depuis plus de vingt ans. […] Notre témoin, qui souhaite garder l’anonymat, croit tenir la clé de la relation Grimaud-Bolloré : “Bolloré, c’est un catholique qui se sert de la religion […] Lui et son abbé croient au pouvoir magique du sacrement. C’est simple : quand Bolloré fait une bêtise, il se confesse. Il se blanchit et il repart. C’est une conception très vieille France de la religion, préconciliaire (Vatican II) que l’on inculquait aux enfants avant guerre pour les tenir.” […] Il semble que l’abbé Grimaud soit celui qui réconcilie la vie terrestre de Vincent Bolloré avec ses aspirations spirituelles. »

TELERAMA : ENTRETIEN

JEAN-PIERRE CANET ET NICOLAS VESCOVACCI : “VINCENT BOLLORÉ, C’EST L’IMPUNITÉ TOTALE”

Extraits :

« Les deux auteurs de “Vincent tout puissant”  reviennent sur la génèse de ce livre révélation, qui met à nue les pratiques du patron de Canal+.

Lors de la déprogrammation sur Canal+ du documentaire sur le Crédit Mutuel-CIC, décidée par Vincent Bolloré, vous étiez aux premières loges. Dans les mois qui ont suivi, vous avez même été contraints de quitter KM, le producteur. Vous réglez vos comptes ?

Non. Beaucoup de choses avaient été écrites sur cette histoire, mais jamais par ceux qui l’ont directement vécue ! Cette censure brutale, « à l’ancienne », constitue le premier acte de la révolution éditoriale menée à Canal+ par Vincent Bolloré. Quand un des lanceurs d’alerte du Crédit Mutuel-CIC nous a dit « vous savez, ce n’est pas sûr qu’elle sorte, votre enquête… », on lui a ri au nez. En fait, il était bien informé. Après ce documentaire, on devait faire aussi de l’investigation pour Le grand journal ! Avec ce livre, on voulait comprendre ce qui nous était arrivé.

Et alors ?

On a péché par naïveté. Personne n’avait imaginé que Vincent Bolloré pouvait exercer un tel contrôle. On était sur Canal+, l’antenne qui a révolutionné le PAF dans les années 90 et lancé l’investigation à la télévision, avec 90 minutes et Le vrai journal. Il existait à notre sens un véritable « esprit Canal », une sorte de pacte avec les abonnés qu’on peut résumer comme suit — à part le foot et le cinéma, on peut dire à peu près ce qu’on veut. L’intérêt marketing de la chaîne rencontrait l’intérêt journalistique en interne. Bref, subir la censure était impensable, au risque d’abîmer l’image de la chaîne en profondeur. Vincent Bolloré s’en moque. A i-Télé, il s’est débarrassé sans vergogne d’une centaine de personnes. Les gens ne se rendent pas compte ce qui est arrivé à cette chaîne ! Dès qu’on a compris que notre affaire était grave, on s’est dit qu’on se battrait pour que ce documentaire soit diffusé. Notre affaire pose aussi la question de la concentration des pouvoirs : cet homme-là plus que d’autres utilise ses médias pour servir ses intérêts personnels, sans aucune limite.

Evasion fiscale Crédit mutuel : les dessous d’une enquête censurée

Comment analysez-vous la façon dont Vincent Bolloré mène ses affaires ?

C’est un activiste financier, au sens anglo-saxon du terme : il investit dans des boîtes pour en tirer un maximum de dividendes et de cash le plus rapidement possible. La manière dont il a mis la main sur Canal+ — vendre ses chaînes Direct 8 et Direct Star, pour ensuite monter au capital de Vivendi et prendre le contrôle, on n’est pas loin du coup du siècle ! A chaque fois, les gens en face, comme Martin Bouygues, Alain de Pouzilhac chez Havas ou Bertrand Meheut à Canal+, ne le voient pas venir. Ses méthodes choquent même le monde des affaires, qui admire pourtant ses coups financiers. Le Meccano industriel, comme savoir s’il faut ou non faire des synergies avec Dailymotion, etc., ce n’est pas son sujet (…)

Et la manière dont il exerce le pouvoir ?

Ce qui frappe, c’est son impunité totale. Il n’a aucun rôle opérationnel à Canal+, mais c’est lui qui fait tout. Il y exerce un pouvoir par la peur – il a dit lui-même qu’il faut un peu de « terreur » pour gouverner. Il y a eu une forme de soumission de cette chaîne — alors que i-Télé a fait grève un mois — qui interroge. Vincent Bolloré joue sur l’incapacité des gens à exercer une résistance éclairée. Pourquoi des historiques comme Michel Denisot, Antoine de Caunes, ou même Pierre Lescure, n’ont-ils jamais pris la parole pour défendre Canal+ ? On peut faire le parallèle avec le « shock and awe » (le choc et l’effroi), mis en œuvre par l’armée américaine en Irak en 2003. Tu frappes fort, tu crées la peur et l’effroi, et après plus personne ne bouge. Que ce soit les salariés, les dirigeants mais aussi l’Etat. Très peu de politiques ont réagi à ce qui s’est passé à i-Télé, à l’exception d’Arnaud Montebourg, Marie-Noëlle Lienemann et David Assouline. François Hollande et Manuel Valls n’ont pas dit un mot ! (…)

“Emmanuel Macron a soutenu la montée de Bolloré dans le capital de Vivendi quand il était à Bercy… Et aujourd’hui président de la République, il répond au téléphone à Cyril Hanouna”

Dans le livre, vous évoquez aussi les nombreux relais de Vincent Bolloré dans le monde politique…

Alors qu’il était conseiller de François Hollande à l’Elysée, Bernard Poignant a déclaré à l’un de nous deux que « Vincent Bolloré, c’est un bout de la France ». Il estime qu’un industriel comme lui doit être soutenu et vénéré par le pouvoir car il représente notre pays. François Hollande confirme pour la première fois dans le livre avoir évoqué avec son homologue Paul Biya le sort du port de Kribi, au Cameroun, lors d’un voyage officiel dans ce pays en juillet 2015. Candidat à sa concession, le groupe Bolloré, non retenu dans un premier temps, l’a finalement décrochée quelques semaines après cette visite. De son côté, Emmanuel Macron a soutenu la montée de Bolloré dans le capital de Vivendi quand il était à Bercy… Et aujourd’hui président de la République, il répond au téléphone à Cyril Hanouna quand celui-ci lui souhaite son anniversaire en direct à la télé ! C’est assez dingue.

En janvier 2017, alors en pleine enquête, Nicolas Vescovacci a été assigné en justice, le groupe Bolloré lui réclamant 700 000 euros de dommages et intérêts. Cela vous-a-t-il surpris ?

C’est du jamais-vu. Car cette assignation concernait… de simples demandes d’interview sur des questions précises afin de respecter le principe du contradictoire. Sept en tout, ça nous fait 100 000 euros la question, c’est un peu cher, non ? Plus sérieusement, c’est à notre sens l’exemple type de « poursuite-bâillon », destinée à dissuader les journalistes d’enquêter et à les réduire au silence. Comme de nombreux confrères, collectifs et sociétés de journalistes, nous avons d’ailleurs signé la semaine dernière la tribune publiée dans de nombreux médias (dont Télérama) pour dénoncer ces procédures abusives. »

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