Luc MICHEL pour PCN-INFO/
2017 01 17/

« Je pense qu’elle (Mme Merkel) a fait une erreur vraiment catastrophique qui a été d’accueillir tous ces (migrants) illégaux, vous savez prendre tous ces gens d’où qu’ils viennent. Et personne ne sait d’où ils viennent »
– Donald Trump (interviewé par le Times).

« Je pense très franchement qu’il était déplacé pour le président élu des Etats-Unis de s’immiscer dans les affaires d’autres pays de manière aussi directe »
– John Kerry (secrétaire d’état US sortant).

« Je parle de millions d’hommes à qui on a inculqué savamment la peur, le complexe d’infériorité, le tremblement, l’agenouillement, le désespoir, le larbinisme »
– Aimé Césaire (Discours sur le colonialisme).

Il y avait « l’homme qui voulait être roi » de Kipling.
Il y a aujourd’hui la domestique qui croyait être reine. Angela Merkel !

Pour comprendre le faux psychodrame ouvert par les déclarations de Trump sur Mme Merkel il faut passer par une image et un détour :

COMPRENDRE LE PSYCHODRAME TRUMP-MERKEL (1) : UNE IMAGE. LES MATRIOCHKA

L’image, celle des Matriochka (les fameuses « poupées russes », qui sont ici américaines) …
Une poupée emboîte l’autre, la plus grande contient toutes les autres. C’est exactement l’image de l’impérialisme américain (qui est la « nouvelle Carthage » et non pas le nouvel Empire romain, les idéologues de l’utra-gauche et ceux du néofascisme rampant ayant une fausse perspective historique et géo-idéologique de « l’empire »).

Washington dominant le monde autour de cercles de pouvoir concentriques :
– le monde anglo-saxon (Angleterre, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande, etc … et Israël, tous partageant la même vision du monde, le même univers mental) – noyau dur de l’impérialisme. Et le rappel par Trump de son soutien étroit à la politique aventuriste de Londres rappelle que la Grande-Bretagne a toujours été un cheval de Troie américain dans la CEE-UE et que l’impérialisme anglo-saxon (où Washington a succédé à Londres) est une réalité de base (),
– puis les membres de l’OTAN (ceux-ci divisés entre « vieille » et « nouvelle » Europe),
– ensuite les peuples périphériques (Afrique, Amérique Latine et Asie).
– Face à eux l’ennemi, Russie, Chine et Etats rebelles dits « voyoux ».

Dans cette géopolitique, deux phénomènes :

– La sujétion de l’UE par l’OTAN (qui est un harnais et non « le bouclier de l’Europe »), les membres de l’UE n’étant pas des partenaires mais des domestiques. Ce que Trump, dans sa brutale arrogance, vient de rappeler à Mme Merkel et aux autres.
– Le basculement opéré entre la « vieille Europe » (Berlin, Paris) et la « nouvelle Europe » (Varsovie et cie) par Washington comme allié privilégié. Dans l’optique de la IIIe guerre mondiale (annoncée brutalement – la brutalité est la marque de la géopolitique américaine depuis la politique du « big stick » de Téodore Roosevelt – dans les analyses prospectives de Stratfor), la Pologne devient l’allié géopolitique principal et l’Allemagne, à la tête d’une UE résiduelle de douze membres, sort de l’Histoire.

COMPRENDRE LE PSYCHODRAME TRUMP-MERKEL (2) : UN DOUBLE DETOUR PAR L’AFRIQUE

Premier détour.
La politique africaine, celle du colonialisme, et la psychologie du colonisé esquissée par le grand Frantz Fanon, éclaire la relation USA-OTAN d’une lumière crue. Le sujet demanderait un livre, je me contenterai de quelques axes de réflexion.
Les membres de l’UE ne sont pas des partenaires mais des domestiques, ou des « chefs coutumiers » pour prendre une comparaison congolaise (Lénine parlait lui de « bourgeoisie compradore). Entre 1914 et 1944, l’Europe (conçue comme ensemble géopolitique) passe du stade de puissance colonisatrice mondiale au stade de peuples colonisés. Depuis le 6 juin 1944, l’Europe occidentale devient la principale colonie de l’impérialisme américain (son « second poumon », c’est l’addition des puissances industrielles ouest-européennes et américaine qui fait la superpuissance). Les relations inégalitaires, de type colonial, que les Européens ont imposées à l’Afrique, ils les subissent de la part des USA, en particulier dans l’OTAN !

Second détour.
Frantz Fanon explique bien la sujétion mentale du colonisé (« Peau noire, masques blancs », 1952) (). Cette sujétion mentale est du même type que celle qui lie la « bourgeoise compradore » ouest-européenne aux USA, via l’Atlantisme (Le générale de Gaulle ou le géopoliticien Thiriart parlent tous deux de « parti américain »).
On a tiré de cette psychologie l’opposition entre « esclaves de plantation » et « esclaves de maison » (qui explique des phénomènes du colonialisme comme la « Françafrique »). La classe politico-médiatique atlantiste – celle de l’UE (mais aussi les bourgeoisies compradores des ex-républiques soviétiques) – est une forme européenne des esclaves de maison. L’esclave de maison Merkel, la domestique qui croyait être reine dans sa tête américanisée, vient de se voir brutalement rappelé à la réalité coloniale de l’UE, domestiquée rappelée à l’ordre par le maître colonial : la reine est nue !

LUC MICHEL / PCN-INFO
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NOTES ET RENVOIS

() Federica Mogherini, chef de la diplomatie de l’Union dite « européenne », a averti lundi le Royaume-Uni qu’il n’était pas question qu’il négocie un accord commercial avec les Etats-Unis avant que sa sortie de l’UE (« Brexit ») ne soit effective. Dès lors que le Royaume-Uni est encore membre de l’UE, « il n’y pas de négociations de manière bilatérale sur un quelconque accord commercial avec un tiers (…) C’est dans les traités », a rappelé Mme Mogherini lors d’une conférence de presse à Bruxelles.
Le président élu des Etats-Unis Donald Trump, qui a salué le Brexit, a annoncé vouloir conclure « très rapidement » un accord commercial avec le Royaume-Uni. « Nous allons travailler très dur pour (qu’un tel accord) soit conclu rapidement et dans les règles. Bon pour les deux parties », a souligné M. Trump dans une interview dimanche aux quotidiens britannique Times et allemand Bild. Interrogé sur la possibilité de signer un accord commercial avec le Royaume-Uni, il a répondu « absolument, très rapidement. Je suis un grand fan du Royaume-Uni, nous allons travailler très dur pour le faire rapidement et dans les règles. Bon pour les deux parties ». « Une très bonne nouvelle », a réagi lundi matin le chef de la diplomatie britannique Boris Johnson.

() Frantz Fanon, Peau noire, masques blancs, Le Seuil, Paris, 1952.
Une analyse, d’un point de vue psychologique de ce que le colonialisme a laissé en héritage à l’humanité, et ceci en partant du rapport entre le Noir et le Blanc. Sa thèse est que la colonisation a créé une névrose collective dont il faut se débarrasser. Cette courte œuvre demeure importante dans la littérature anti-colonialiste.

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