Le CNDD-FDD nous avait habitué à des congrès avec des coups bas et des complots. La dernière fois que le parti se réunissait, c’était pour annoncer que Nkurunziza serait le candidat présidentiel, en écartant notamment Rufyikiri et Ntavyohanyuma, deux grands futurs frondeurs.
Avant cela, il y avait eu 2012. Nyabenda était monté sur le trône dans de vives tensions, les rumeurs faisant état de mauvaises relations entre le président du Conseil des Sages et le numéro un du CNDD-FDD sortant, Jérémie Ngendakumana. Lui aussi futur frondeur.
Quatre ans plus tôt, c’était le fameux congrès de Ngozi qui avait éjecté Radjabu et les siens, divisé en deux l’Assemblé nationale et l’opinion, avant de lancer une chasse à l’homme contre les radjabistes. Huit ans plus tard, la politique burundaise paie encore le prix de ce séisme politique.

Cette fois-ci, le parti a tout fait pour montrer le calme après la tempête. Même le président sortant, qui avait déjà dit « Bye bye! Je m’en vais en paix » a été obligé de rester. Encore deux mois d’exercice, le temps qu’il organise toute une chaîne de congrès de la base jusqu’au sommet pour remplacer les organes du parti.
Entre-temps, le Ministère de l’Intérieur aura agréé les nouveaux statuts du parti. Selon la nouvelle structure du CNDD-FDD, les postes de Président et des deux vice-présidents sont supprimés. Ils sont remplacés par un Secrétaire général et son adjoint. Sont également supprimés les Commissariats généraux, remplacés par des Départements.

Une nouvelle organisation adoptée avec en tête le combat électoral de 2020 : « La victoire de 2015 est moindre par rapport à celle de 2020, et je prends Dieu en témoin », a lancé le président Nkurunziza aux congressistes.
S’il était aussi enthousiaste, c’est que le président du Conseil de Sages savourait une reprise en mains douce du parti, à l’instar de ses pairs de l’EAC. Museveni est à la tête du NRM, Kagame dirige le FPR, Kenyatta conduit la coalition Jubilee, et Magufuli prendra possession bientôt du CCM, en juillet prochain.
Un contrôle qui aura l’avantage d’apporter plus de cohérence entre la politique du gouvernement et les actions stratégiques du parti. Notamment la question de l’affectation des compétences. Le CNDD-FDD va désormais se passer des « commissionnaires » de postes politiques, le Président étant entouré par une équipe de détecteurs de talents.
Cette position idéale permettrait à Nkurunziza de préparer sa succession, en mettant progressivement en place une équipe chargée de prendre la relève après 2020.

Clôturant les deux jours de congrès un dimanche, le président Nkurunziza a longuement fait référence à Dieu. « Ce mandat est divin. Je vous appelle à cheminer, aujourd’hui plus que jamais dans la lumière de Dieu. L’ennemi du CNDD-FDD s’étiolera comme une traînée de poudre et vous allez le constater de vos yeux. »
Revenant sur « la crise de 2015 », Nkurunziza a admis: « Elle nous a beaucoup instruit. Nous remercions nos ennemis pour la leçon qu’ils nous ont donnée. Désormais, nous ne négligerons plus rien. »

Et de livrer « 14 conseils aux Bagumyabanga ». Placer Dieu au premier plan. Savoir mobiliser l’intelligence (différente du savoir). Avoir la patience et se défaire de la paresse. Respecter la hiérarchie, planifier des projets qui profitent à plusieurs, et qui respectent l’environnement. Renforcer nos familles. Éviter de répandre des rumeurs sur autrui. Être prêt à se sacrifier pour l’indépendance du Burundi. Participer aux travaux de la CVR : « Si la vérité sur les différentes crises du passés n’est pas élucidée, les futures générations feront les frais de la résurgence des crises comme celles de 2015 » a dit Nkurunziza.

Il a aussi appelé les membres du CNDD-FDD à prêter attention aux veuves et aux orphelins. Sur ce, sans la nommer, il a demandé que le sort de Margueritte Barankitse serve de leçon au Burundi : « Elle avait tout. Décorée aux ordres nationaux, acclamée par le monde entier pour ses bonnes œuvres, riche, elle a fini par céder à la tentation du pouvoir. Que voulait-elle de plus ? Diriger le pays ? C’est quelque chose d’assez compliquée à avoir au Burundi. »

(Source : ikiriho.org, 20 juin 2016)

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